Passengers, Morten Tyldum
2 juillet 2018​
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Passengers, film de Morten Tyldum, 2016
Séduire, c’est conduire vers soi une conscience éveillée. Lassé de la solitude et attiré par sa beauté, Jim réveille donc Aurore (comme le prince ôte du sommeil la Belle au bois dormant). La jolie jeune femme au passé prometteur devrait pourtant dormir encore 89 ans, le temps que s’achève le voyage vers la planète promise. Mais Jim, lui, cela fait déjà une année qu’il traîne dans ce vaisseau. Un bug l’a sorti de son compartiment de dormeur. Tout est automatisé à bord, ce qui exclut la prise en compte d’une situation exceptionnelle. Jim est prisonnier d’une machinerie qui ne peut l’aider, pire, se dégrade lentement de bug en bug. Quand Aurore apprend la vérité, elle repousse son éveilleur. Son reproche ? Lui avoir volé sa vie. Séduire, serait-ce voler une vie ? A-t-on le droit, quand on est seul, de s’attribuer de force une présence, une compagne ?
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À supposer qu’ils se réconcilient, une autre question se pose : vivre à deux une vie entière de farniente à bord d’un vaisseau de croisière spatial, quel sens cela a-t-il ? Être passager toute son existence en compagnie d’un autre, est-ce enviable ? Si vous aviez le choix de traîner 89 ans dans les coursives de la nef ou de retourner en hibernation, en abandonnant votre compagnon d’infortune à son sort, quelle décision prendriez-vous ?
(spoilers)
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En fait, en réparant l’astronef de ses dysfonctionnements fatals, le couple sauve les 5'000 passagers qui poursuivent leur sommeil. Cet exploit, à lui seul, paraît justifier le réveil de la jeune femme. Si elle était restée endormie, l’astronef aurait été désintégré. Sans elle, Jim n’aurait pu sauver le navire spatial. C’est une « purge » par une manœuvre manuelle nécessitant un risque sacrificiel qui va restaurer le bon fonctionnement du vaisseau.
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Passengers n’est pas un film d’action, encore moins un thriller. Pas de boum-boum. Un film qui s’interroge sur la fiabilité des machines, sur le droit amoureux, sur le sens de la vie sans travail. Enfin, pas tout à fait, puisque le couple va créer un jardin labyrinthique à l’échelle de la nef. Notez que la perspective de la progéniture semble occultée.