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Le portail des mondes, Audrey C.

20 Septembre 2021 ​

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Le Portail des mondes nous entraîne à la suite de son héroïne, la jeune Cassie, une militaire qui n’a pas froid aux yeux, dans une odyssée impliquant des haltes sur plusieurs planètes. L’une d’elle, habitée par des rustres cyclopéens, déclare la guerre aux autres mondes.

Le récit épique comporte trois parties. La première, merveilleuse, où l’imaginaire donne à explorer trois mondes dont deux paradisiaques. Sur la planète sombre vivent des êtres en rocs, lents et limités (pourvus d’un seul œil et peu portés sur l’amabilité). Sur Fiore virevoltent des Fées avec des ailes de papillon. Sur Coedena voisinent trois peuples, des géants bleu-vert, tatoués ; dans ce dernier monde, l’héroïne peut même rencontrer une divinité primordiale qui la valorisera, lui reconnaissant sa pureté, et ira même jusqu’à la protéger d’un assassinat pendant le sommeil.

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Une deuxième composante surgit brusquement de la première, du type Space Opera : dès lors, une suite d’épreuves guerrières héroïques secoue le lecteur dans les mondes naguère merveilleux, mais à présent dominés par le mal et la cruauté sans merci. Les trois planètes ont été envahies et assujetties par une quatrième, rocheuse, impitoyable, le monde des ténèbres qui veut se venger d’avoir été déconsidéré. Dans cette violence où peu d’horreurs lui seront épargnées, l’héroïne perd tous les siens, y compris sa petite sœur qui sera kidnappée. Au combat pour la survie s’ajoute désormais la quête de la cadette.

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Enracinée dans un récit de guerre, voire déjà dans la partie « merveilleuse », la troisième composante semble caractérisée par de nombreux traits du genre « voyage initiatique » :

1) rupture avec le monde natal et familier ; 2) isolement et passage d’un monde à un autre avec multiplication des épreuves et des périls mortels ; 3) changement d’apparence, abandon des vêtements propres à ses semblables ; 4) rencontre d’êtres supérieurs, dotés de pouvoirs inconnus ; 5) renaissance, retour à la vie ; 6) accès à un statut supérieur.

Reste donc à déterminer de quelle mystérieuse initiation il s’agit ici. L’idée liée à l’initiation paraît simple : ce n’est pas le monde qu’il faut changer, mais la nouvelle génération.

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En l’occurrence, le voyage semé d’embûches mortelles conduit Cassie vers quoi ? Au fil du récit, surtout dans la dernière partie, on a le sentiment que l’héroïne se rapproche d’un jeune prince, en dépit de ses défauts. On frôle même l’attachement, dans une dynamique qui alterne l’attirance et la répulsion. On se souvient aussi que Cassie déclare fuir la relation amoureuse au début de l’histoire. Elle préférait alors rester célibataire.

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Ainsi, on le voit, Le Portail des mondes est un roman nuptial où se déroule l’initiation au couple en plein théâtre d’une guerre des mondes.

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La narratrice transgresse trois normes habituelles (ce qui n’est bien sûr pas un défaut, souvent au contraire). La première, l’exposé d’un décor paradisiaque (mis à part le premier monde obscur) reporte l’irruption de la crise non loin de la moitié du récit. La deuxième, l’unité narrative est rompue de manière originale à plusieurs reprises par la simple mention du nom (en gros caractères gras) de celui ou celle dont on découvre le point de vue ; on passe ainsi d’une conscience à une autre, brièvement. La troisième est la plus spectaculaire : la fin du récit ne correspond pas à la résolution d’un problème, elle ne décrit pas un accomplissement, un état qui permet au lecteur de dresser un bilan. Les dernières lignes plongent dans l’inachevé : l’héroïne n’est ni morte, ni sauvée. Le texte annonce donc une suite. On se situe davantage dans la série ou le feuilleton que dans le roman. À noter que, sur la couverture, le nom de la rédactrice du roman est lui-même inachevé : Audrey C.

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